EDF livre ses excédents nucléaires à un mineur de bitcoin américain
La France s’apprête à céder en douce ses surplus d’énergie nucléaire à un américain alors que des mineurs français font le pied de grue depuis des années.
En bref
- Exaion, une filiale d’EDF en passe d’être avalée par le plus grand mineur de bitcoins américain : Marathon.
- Le mineur français Sébastien Gouspillou s’insurge contre « ce marché de dupe qui laisse aux États-Unis l’exclusivité du mining français ».
L’affaire Exaion
Il y a parfois des affaires qui ressemblent à de la forfaiture. Par exemple, l’affaire Alstom et la vente controversée de sa branche énergie au géant américain General Electric.
Heureusement, EDF a depuis racheté ce fleuron industriel et ses fameuses turbines « Arabelle ». Leur maintenance et leur production pour les six prochains réacteurs nucléaires EPR est à présent sécurisée. Cependant, toute exportation (notamment vers le russe Rosatom) nécessitera dorénavant le feu vert américain…
Mais passons, le nouveau scandale se nomme Exaion, une filiale d’EDF en passe d’être avalée par le plus grand mineur de bitcoin américain : Marathon. Le mineur français Sébastien Gouspillou s’est insurgé sur Le FigaroTV. Pour lui, EDF abandonne ses surplus d’énergie nucléaire au mépris des intérêts nationaux :
En rachetant la filiale Exaion, Marathon se positionne pour récupérer l’énorme potentiel minier que la France se refuse toujours d’exploiter. Il est évident que Marathon vient pour miner des bitcoins. […] EDF est en train d’offrir l’exclusivité du mining français (8 GW) aux États-Unis.
Sébastien Gouspillou, co-fondateur de BigBlock.
Il y a ici des similitudes avec l’affaire Alcatel, cet autre fleuron français livré au concurrent américain Lucent. Il en découla la perte des brevets en fibre optique, sans parler du sauf-conduit pour la NSA dans les infrastructures de télécommunication françaises…
Le cheval de Troie Exaion
Marathon a déposé son dossier début septembre auprès de la Direction générale du Trésor. Le ministre de l’Économie a désormais un mois pour déclencher une phase d’étude approfondie du dossier.
L’institut national du Bitcoin s’est montré hostile à ce rachat dans une lettre ouverte à l’attention des députés, parlant « d’enjeu majeur de souveraineté énergétique, numérique et financière ».
Nous y apprenons notamment que malgré des annonces médiatiques évoquant 170 millions d’euros, EDF ne percevra en réalité que 29 millions d’euros. Soit à peine plus que les 25 millions d’euros investis. Le reste correspond à des apports de capitaux, et non à une plus-value pour EDF.
D’après M. Gouspillou, ces 170 millions d’euros serviront prioritairement à miner des bitcoins, les annonces concernant l’IA et le Cloud n’étant qu’un écran de fumée.
Une telle somme permettrait à Marathon de rafler 1,50 % de la puissance de mining mondial. De quoi produire sept bitcoins par jour. Une formidable occasion manquée d’après l’Institut National du Bitcoin :
La multiplication des surplus d’électricité crée une opportunité : absorber les excédents quand les prix chutent et rendre de la puissance au réseau en cas de tension. Nous pourrions ainsi mieux valoriser les kWh financés par le contribuable.
Institut National du Bitcoin
Qu’on se le dise, l’industrie du bitcoin est le maillon manquant de la transition énergétique. Elle peut consommer les excédents d’électricité nucléaire et se débrancher sur demande. Loin d’être un simple consommateur d’énergie, le bitcoin permet un ajustement par la demande au combien précieux.
Les écologistes se fourvoient sur le bitcoin
Oui, le Bitcoin consomme beaucoup d’électricité, mais on ne peut pas s’arrêter à ce simple constat et fermer les écoutilles.
Il n’aura pas échappé aux verts qu’équilibrer le réseau électrique par la demande est essentiel pour accommoder à moindre coût l’essor des énergies renouvelables et le casse-tête qu’elles représentent pour les gestionnaires de réseau.
Abîmer les centrales nucléaires en modulant sans arrêt leur production d’électricité pour compenser l’intermittence de l’éolien n’est pas tenable. Quel gâchis, surtout à l’heure où l’on cherche des dizaines de milliards pour construire six nouveaux réacteurs.
La solution qui nous tend les bras est de laisser les réacteurs fonctionner de manière optimale et de miner des bitcoins avec les excédents. Nous préserverions notre patrimoine nucléaire tout en renforçant les finances d’EDF.
Les mineurs de bitcoins ont ce grand avantage de pouvoir s’arrêter en un claquement de doigt. En d’autres termes, plus besoin de coûteuses centrales de pointe ni de puiser dans les réserves hydrauliques des barrages. Cette symbiose avec les énergéticiens existe déjà au Texas.
Cela marche si bien que le gestionnaire de réseau local (ERCOT) a récemment annulé la construction de plusieurs centrales à gaz. Elles ne sont plus nécessaires puisque les mineurs peuvent rendre à tout moment plus de 3 GW, sans contrainte de temps.
Les réticences intitiales des partis écologiques sont compréhensibles, mais il faut désormais faire une analyse impartiale de la situation pour ne pas risquer un fiasco.
Gouverner, c’est anticiper
La France est véritablement une pionnière du bitcoin. Ledger est par exemple numéro un mondial des hardware wallets. Phoenix est également leader dans son domaine (wallet Lightning). Et le fait est que nous pourrions bâtir la première industrie minière au monde si la volonté politique y était.
Au lieu de ça, nous laissons les grandes puissances se partager le gâteau. L’Amérique du Nord (~45 %), la Russie (~17 %) et la Chine (~15 %) en profitent et plusieurs énergéticiens publics sont déjà au travail. C’est le cas au Japon, au Salvador, au Laos, au Kirghizistan, en Éthiopie, au Bhoutan, en Iran ainsi qu’aux Émirats arabes unis.
Pourquoi tant d’hésitation sur le vieux continent ? Rendons-nous compte que les États-Unis sont sur le point de faire du bitcoin leur monnaie de réserve ! Croire, comme Christine Lagarde, que l’euro puisse devenir la première monnaie de réserve internationale est un pari risqué. Surtout après avoir gelé 300 milliards d’euros appartenant à la Russie.
A contrario, le bitcoin est une monnaie / réserve de valeur apatride en même temps qu’un système de paiement non censurable. Deux-en-un. Il représente le futur maintenant que les BRICS mènent la fronde contre le dollar.
À l’instar des États-Unis (~200 000 BTC), la France pourrait créer sa propre réserve stratégique de bitcoins grâce à ses excédents d’énergie nucléaire. Qu’attendons-nous ?
Et si nous ne léguions pas que de la dette aux générations futures…
Lisez notre article : Les États-Unis all-in sur le Bitcoin.
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Reporting on Bitcoin and geopolitics.
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