A
A

Parlement européen : Défiance à l’égard des cryptoactifs

lun 11 Avr 2022 ▪ 6 min de lecture ▪ par Anne-Lise K.

Les différents dons en cryptomonnaies envoyés à l’Ukraine suite à l’invasion militaire et le risque de leur utilisation par les autorités russes pour contourner les sanctions financières européennes ont inexorablement accéléré la volonté des législateurs de réguler les actifs numériques. Dans ce contexte, le Parlement européen fait montre d’une méfiance eu égard aux récentes prises de position au sujet du Règlement européen « MiCA » et sur la modification du Règlement 2015/847 sur les transferts de fonds, dit TFR.

Règlement TFR : la position du Parlement européen

Le règlement TFR porte sur les systèmes de paiement et a pour ambition de contrer le blanchiment d’argent ou le financement du terrorisme. S’il est entré en vigueur le 26 juin 2015, le texte est aujourd’hui discuté devant le Parlement européen afin que les transferts de cryptoactifs entrent dans son champ d’application. À cette fin, l’Union européenne s’appuie sur les recommandations du GAFI (Groupe d’action financière).

Fin mars 2022, les commissions ECON (affaires économiques et monétaires) et LIBE (libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures) se sont prononcées en faveur de l’obligation des PSAN (prestataire de services sur actifs numériques) à partager les informations personnelles de leurs clients lors des transferts de fonds. L’argument avancé est celui que les cryptomonnaies facilitent les activités criminelles et le blanchiment d’argent. Les wallets privés, c’est-à-dire les portefeuilles non hébergés par un prestataire de services sur cryptoactifs, sont mis en cause dans ces discussions.

Si le texte est définitivement voté, ce qui est encore loin d’être le cas, les PSAN devront transmettre l’ensemble des informations liées aux transactions venant d’un portefeuille, signaler aux autorités les transferts supérieurs à 1 000 €, et collecter puis vérifier les données personnelles au sujet de ces portefeuilles. Ainsi, ce texte oblige les acteurs du marché crypto à passer par un intermédiaire pour assurer leurs transactions. La nouvelle réglementation pourrait donc imposer aux entreprises du secteur de collecter le nom, l’adresse, la date de naissance et le numéro de compte d’un expéditeur ou destinataire afin de permettre une traçabilité complète des transferts de cryptoactifs. 

Règlement MiCA : la position du Parlement européen

À la différence du Règlement TFR, la proposition de règlement sur les marchés des cryptoactifs, dit Règlement MiCA, n’a pas pour ambition d’empêcher les transactions qui alimentent les activités criminelles, mais de limiter l’impact de la blockchain sur l’environnement. Soumis au vote puis écarté par la Commission ECON mi-mars 2022, l’amendement le plus controversé visait la restriction voire l’interdiction des cryptoactifs s’appuyant sur le Proof-of-Work, comme le bitcoin (BTC), mais aussi l’ether (ETH).

Pour rappel, le Proof-of-Work (ou preuve de travail) est un mécanisme de consensus qui permet de valider les transactions afin d’être ajouté à la blockchain, indispensable à plusieurs cryptomonnaies. Cette preuve de travail est nécessaire afin que ces monnaies demeurent décentralisées. Néanmoins, d’aucuns considèrent que l’impact écologique d’un tel mécanisme, et notamment à travers l’activité de mining pour le bitcoin (BTC), impose au législateur d’interdire la pratique.

Ce texte pourrait ainsi interdire le bitcoin (BTC) et l’ether (ETH), deux des plus grandes cryptomonnaies du marché, et augmenter l’incertitude sur les marchés des NFT et de la DeFi. A contrario de cette tendance de défiance, le Président américain Joe Biden a signé un décret afin de garantir un développement qui se veut responsable concernant les actifs numériques. 

La réaction des acteurs de la blockchain 

Plusieurs acteurs, que ce soit des entreprises comme Ledger ou des particuliers, s’insurgent contre ces prises de position. Concernant les activités criminelles utilisant les cryptomonnaies, une partie des opposants aux initiatives de l’Union européenne s’appuie sur le récent rapport de Chainalysis, une entreprise exerçant dans l’analyse des transactions et traitement de blockchains.

Ce rapport indique que sur l’année 2021, la criminalité ne représente que 0,15 % des transactions en cryptomonnaies. 0,05 % du volume global de ces transactions étant lié au blanchiment d’argent. 

Par contraste, on estime que 2 000 milliards de dollars sont blanchis chaque année par la finance traditionnelle, c’est-à-dire en devises fiduciaires. Un chiffre 232 fois supérieur au montant blanchi par les cryptomonnaies. 

D’aucuns avancent enfin l’argument du risque de piratage. Dès lors que la réglementation TFR telle que rédigée serait appliquée, les bases de données personnelles de chaque utilisateur seraient soumises à un risque accru de piratages de masse.

Si cette défiance ne s’est pas encore matérialisée, du fait de la navette démocratique parlementaire, il est possible que durant les prochains mois, cette stricte réglementation soit appliquée. Certains particuliers et entreprises pourraient alors délocaliser leurs activités.

Maximisez votre expérience Cointribune avec notre programme 'Read to Earn' ! Pour chaque article que vous lisez, gagnez des points et accédez à des récompenses exclusives. Inscrivez-vous dès maintenant et commencez à cumuler des avantages.


A
A
Anne-Lise K. avatar
Anne-Lise K.

Passionnée des nouvelles technologies et d'informatique, la blockchain et la crypto sont un domaine dans lequel je me suis totalement épanouie. Je suis persuadée qu'elles constituent une partie cruciale de notre avenir !

DISCLAIMER

Les propos et opinions exprimés dans cet article n'engagent que leur auteur, et ne doivent pas être considérés comme des conseils en investissement. Effectuez vos propres recherches avant toute décision d'investissement.