Fed : La justice empêche Trump de limoger Lisa Cook

Le bras de fer entre Donald Trump et la Réserve fédérale américaine franchit un seuil inédit. Le 9 septembre, la justice fédérale a suspendu le limogeage de Lisa Cook, gouverneure de la Fed, décidé par le président américain. Une décision rare, qui souligne l’enjeu majeur de ce conflit : l’indépendance de la banque centrale face aux pressions politiques. À l’approche d’une réunion stratégique sur les taux, ce coup d’arrêt judiciaire relance le débat sur les limites du pouvoir exécutif dans la conduite de la politique monétaire.

Un limogeage interrompu par la justice

Le 25 août dernier, Donald Trump annonçait le limogeage immédiat de Lisa Cook, gouverneure de la Réserve fédérale, sans fournir de justification publique détaillée, alors que a Fed lui résistait et venait de procéder au maintien des taux. Cependant, ce 9 septembre, la justice américaine a suspendu cette décision, considérant qu’elle pourrait être illégale.

La juge fédérale Jia Cobb a estimé qu’il n’existait aucun motif valable pour justifier cette révocation, comme l’exige pourtant la loi encadrant les responsabilités au sein de la Fed. Elle a souligné que Lisa Cook avait de fortes chances de faire valoir que son renvoi enfreint la réglementation applicable aux membres du conseil des gouverneurs.

Voici les principaux faits à retenir sur cette affaire :

• Une décision judiciaire inédite : la juge a bloqué le limogeage de Cook dans l’attente de l’examen sur le fond de son recours, à une semaine d’une réunion décisive de la Fed sur les taux d’intérêt.

• Une disposition juridique claire : la Cour suprême a récemment rappelé que les gouverneurs de la Fed ne peuvent être révoqués que pour des motifs valables, tels qu’un manquement à leurs obligations ou une faute professionnelle.

• Une première historique : selon la juge Cobb, cette tentative de révocation constitue un cas unique dans les 111 ans d’histoire de la Fed.

Cook affirme que Trump a violé la loi en agissant sans justification légale, en s’appuyant sur des faits présumés antérieurs à sa nomination.

La suspension du renvoi de Lisa Cook ne clôt pas l’affaire, mais marque un tournant significatif. La justice américaine a envoyé un signal clair sur la nécessité de respecter l’indépendance de la banque centrale face à d’éventuelles manœuvres politiques.

Le fond de l’affaire sera examiné ultérieurement, mais le maintien provisoire de la gouverneure dans ses fonctions envoie déjà un message fort à l’exécutif.

Une tentative d’ingérence sur fond de stratégie économique

Selon les accusations relayées par l’administration Trump, Lisa Cook aurait menti pour obtenir en 2021 des prêts immobiliers à taux préférentiels. Or, comme l’a souligné la juge Cobb, ces faits présumés sont antérieurs à son entrée en fonction et ne sauraient constituer un motif légal de révocation.

Dans sa décision, la magistrate écrit que « le motif valable n’envisage pas la révocation d’une personne uniquement pour des faits survenus avant son entrée en fonction ». Cette ligne de défense constitue un point central du recours intenté par la gouverneure.

Toutefois au-delà des éléments juridiques, c’est bien la dimension institutionnelle et politique qui domine. L’avocat de Lisa Cook, Abbe David Lowell, a déclaré que la décision de justice « reconnaît et réaffirme l’importance de préserver l’indépendance de la Réserve fédérale contre toute ingérence politique illégale ».

Il a mis en garde contre les conséquences potentielles d’une révocation sans base légale, soulignant que cela « mettrait en péril la stabilité de notre système financier et porterait atteinte à l’état de droit ». Donald Trump, de son côté, n’a pas commenté la décision, ignorant ostensiblement une question d’un journaliste à ce sujet.

Dans ce climat où l’indépendance des banques centrales devient un enjeu politique, le rôle des actifs décentralisés comme le bitcoin prend une nouvelle dimension.

Si la tentative de Trump avait abouti, elle lui aurait permis de nommer une figure plus alignée sur ses positions économiques à l’instar de la nomination de Stephen Miran, à un moment où il exerce une pression croissante sur la Fed pour une baisse des taux. Le maintien de Lisa Cook peut ainsi être interprété comme une barrière levée contre la politisation de l’institution.