La bulle des ETF de 15.000 milliards prête à éclater ?
Le monde de l’investissement a été révolutionné depuis une décennie par la démocratisation des ETF et de la gestion passive. Cette stratégie d’investissement commence toutefois à montrer des signes d’essoufflement inquiétants. Avec des marchés potentiellement surévalués et des prévisions de rendements anémiques pour la prochaine décennie, il devient urgent de remettre en question les ETF.
En bref
- Les grandes institutions financières (Goldman Sachs, Bank of America) prévoient des rendements annuels de seulement 1 à 3 % pour la prochaine décennie.
- Le vieillissement démographique mondial et les risques combinés d’inflation puis de déflation créent un environnement macroéconomique défavorable.
- Une stratégie nuancée est nécessaire : la gestion passive reste pertinente pour les jeunes investisseurs, mais les personnes plus âgées doivent diversifier avec des approches alternatives.
Les marchés sont-ils surévalués ?
L’indicateur CAPE de Shiller (Cyclically Adjusted Price-to-Earnings), une mesure de valorisation qui examine les cours boursiers par rapport aux bénéfices moyens sur 10 ans, atteint aujourd’hui des niveaux alarmants.
Historiquement, des valeurs élevées de cet indicateur ont précédé des périodes de faibles rendements, notamment avant les krachs de 1929, 2000 et 2007. Actuellement, le CAPE se maintient à des niveaux proches de ceux observés en 2021, suggérant une survalorisation persistante.
Les grands acteurs institutionnels partagent cette inquiétude. Goldman Sachs et Black Rock prévoient des rendements annuels de seulement 3 % pour la prochaine décennie, tandis que Bank of America anticipe entre 0 et 1 % par an. Ces projections contrastent fortement avec les performances auxquelles les investisseurs se sont habitués ces dernières années. Seule Morgan Stanley reste modérément optimiste avec une prévision de 7 % annuels.
Cette situation est d’autant plus préoccupante que nous observons une concentration excessive du marché sur quelques géants technologiques. Le déséquilibre entre la valorisation des 10 plus grandes entreprises du S&P 500 et le reste du marché rappelle dangereusement la situation précédant le krach des valeurs technologiques de 2000.
La bourse n’augmente pas toujours
L’histoire des marchés financiers est jalonnée de décennies perdues que beaucoup d’investisseurs contemporains semblent avoir oubliées. Entre 1966 et 1982, le Dow Jones a stagné pendant près de 18 ans. Durant les années 70, le rendement réel annuel moyen des actions américaines était négatif (-1,6 %). Les années 2000 ont connu une performance encore pire avec -3,5 % par an en moyenne.
Le cas japonais est particulièrement intéressant. Depuis l’éclatement de sa bulle financière en 1990, l’indice Nikkei a mis 34 ans pour retrouver ses niveaux d’alors. Cette période prolongée de déflation et de stagnation boursière devrait servir d’avertissement aux investisseurs occidentaux.
La croyance que les approches passives continueront à délivrer des rendements similaires à ceux de la dernière décennie semble aujourd’hui relever davantage de la foi que de l’analyse rationnelle.
Les ETF face à la bombe à retardement démographique
Plusieurs bombes à retardement macroéconomiques menacent la croissance mondiale pour les années à venir. Le vieillissement démographique constitue un défi majeur : dans les pays développés, les populations âgées de plus de 50 ans détiennent 70 % des patrimoines importants. Or, ces générations consomment moins et se préparent à la retraite, ce qui pèse sur la demande globale.
Par ailleurs, nous pourrions entrer dans un environnement économique instable, oscillant entre inflation et déflation. Si la fin de la mondialisation et les tensions géopolitiques poussent d’abord les prix à la hausse, un ralentissement économique ultérieur pourrait conduire à une spirale déflationniste difficile à enrayer, comme l’a vécu le Japon.
Nous entrons peut-être dans une nouvelle ère économique caractérisée par davantage de protectionnisme, d’instabilité et d’incertitude. Ces bouleversements remettent en question les stratégies d’investissement qui ont fonctionné ces quinze dernières années.
Au-delà du « tout ETF »
Face à ces défis, une approche plus nuancée de l’investissement s’impose. La pertinence de la stratégie dépend fortement de l’âge et de l’horizon d’investissement. Pour un jeune de 20 ou 30 ans disposant de plusieurs décennies devant lui, le DCA (Dollar-Cost Averaging) sur des ETF reste une méthode valable pour démarrer, même dans un marché surévalué.
En revanche, pour les personnes de 40-50 ans qui constituent la majorité des détenteurs de patrimoine, la prudence s’impose. Ces investisseurs ne peuvent se permettre de traverser une décennie perdue alors qu’ils approchent de la retraite. Ils devraient donc considérer des approches alternatives et construire un portefeuille antifragile.
Plutôt que d’investir aveuglément et régulièrement, il peut être judicieux d’attendre des points d’entrée plus favorables, lorsque les marchés présentent des valorisations attractives. C’est précisément la stratégie qu’applique Warren Buffett, qui maintient actuellement plus de 300 milliards de dollars en liquidités en attendant de meilleures opportunités.
Alors, les ETF sont-ils morts ?
La gestion passive et les ETF ne sont pas « morts » à proprement parler, mais leur efficacité dépend du contexte. Dans un environnement d’inflation galopante comme celui observé en Turquie, les indices boursiers peuvent servir de protection efficace contre la dévaluation monétaire. À l’inverse, dans un scénario déflationniste, ils pourraient sous-performer pendant des années.
Le bon sens financier nous invite à adopter une position équilibrée. Les ETF et le DCA demeurent des outils précieux dans une stratégie d’investissement globale, mais ils ne devraient pas constituer l’unique approche, surtout dans un marché potentiellement surévalué.
L’âge du « tout ETF » touche peut-être à sa fin, non pas parce que ces instruments ont perdu leur pertinence, mais parce que le contexte économique exige désormais des stratégies plus sophistiquées et adaptatives. Pour traverser la prochaine décennie, les investisseurs devront se diversifier avec d’autres classes d’actif comme bitcoin.
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Les propos et opinions exprimés dans cet article n'engagent que leur auteur, et ne doivent pas être considérés comme des conseils en investissement. Effectuez vos propres recherches avant toute décision d'investissement.