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Trezor et Wasabi déclenchent la controverse

sam 22 Avr 2023 ▪ 7 min de lecture ▪ par Nicolas T.
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Et c’est le drame. Le wallet Wasabi lance un coinjoin en partenariat avec Trezor, le cold wallet développé par le tchèque SatoshiLabs.

Trezor Wazabi wallet coinjoin

Trezor

Le cofondateur de SatoshiLabs Pavol Rusnak, accompagné du CEO de zkSNACKs (et contributeur au wallet Wasabi) ainsi que de Simon Males (Trezor) ont dévoilé leur « COINJOIN » ce mercredi à Prague.

Pavol Rusnak a rappelé en introduction de ce meet up organisé par SatoshiLabs les principes qui guident leur travail :

« L’anonymat protège les individus contre la traque, le harcèlement ou l’usurpation d’identité. Il encourage également la libre expression sans crainte de représailles ou de persécution. C’est essentiel pour prendre des décisions en toute indépendance, sans crainte de jugement ou d’interférence.

La protection de la vie privée contribue à garantir l’égalité de traitement de tous, indépendamment de la race, du sexe, de la religion ou d’autres caractéristiques personnelles, en prévenant la discrimination et les préjugés.

En somme, l’anonymat est un droit humain fondamental qui protège l’autonomie, la sécurité et la liberté de l’individu tout en promouvant la confiance, l’égalité et l’innovation. »

Ces mots prennent tout leur sens quand on voit se développer les attributs de la dystopie que sont les CBDC et le crédit social à la chinoise.

Coinjoin pour quoi faire ?

Le Bitcoin n’est pas à proprement parler un « outil » de protection de sa vie privée. Les transactions sont certes pseudonymes, mais chaque BTC est relié à un historique de transactions pouvant être tracées jusqu’à sa création.

Si bien qu’il suffit qu’une seule transaction soit reliée à une identité pour que tout l’historique de transactions passées et futures soit dévoilé. Et malheureusement, le fait est qu’obtenir des bitcoins nécessite de passer par des exchanges « KYC ».

Ainsi, a minima, les exchanges sont une faille potentielle. Voire même votre fournisseur d’adresse mail ! En effet, Coinbase, pour ne nommer que lui, ne se gêne pas pour envoyer des mails contenant les adresses utilisées pour retirer ses BTC…

Les données des exchanges peuvent aussi fuiter à la suite d’un hack. L’histoire montre que cette probabilité est très élevée. Les données sensibles finissent toujours par tomber dans de mauvaises mains.

Et notamment dans celles de Chainalysis qui ne cache pas faire affaire avec les États. Cette firme d’analyse de blockchain a reçu plus de 25 millions de dollars depuis 2015 de la part du gouvernement américain.

Il est donc crucial de faire régulièrement le ménage dans ses wallets pour effacer ses traces et protéger sa vie privée. C’est précisément la raison d’être du coinjoin.

Joining the coins

Le « coinjoin » est la meilleure manière d’anonymiser les bitcoins à grande échelle. Le principe est de regrouper les transactions d’un grand nombre de participants et de les « mixer » entre elles.

Un coinjoin n’est rien d’autre qu’une transaction réunissant de nombreuses personnes en même temps. Chacun doit fournir des BTC et des adresses vierges afin de construire cette transaction qui va pour ainsi dire rebattre les cartes.

Une transaction coinjoin a donc besoin d’un coordinateur (qui a aucun moment de prend contrôle de vos BTC). Dans le cas de Wasabi, c’est la société zkSNACKs qui se charge de sélectionner les UTXO et de veiller à ce qu’il y ait suffisamment de participants.

Dans le jargon, on parle d’UTXO (Unspent transaction output) pour parler des bitcoins. Il existe actuellement environ 88 millions d’UTXO qui forment ensemble le registre des BTC. Mais encore ?

Un UTXO est un output de transaction. Il s’agit tout simplement d’une fraction de bitcoin, voire plusieurs bitcoins. Si votre wallet affiche un solde 1.5 BTC, il y a en réalité de grandes chances qu’il se compose de plusieurs UTXO qui, en tout, représentent 1.5 BTC.

Il faut s’imaginer les UTXO comme des lingots d’or de diverses tailles que l’on va fondre ensemble au moment d’une transaction et qui donneront des lingots encore différents en ouput. Il est possible de choisir combien d’UTXO apporter en input, ainsi que le nombre d’UTXO en output.

On comprend alors facilement l’intérêt d’une telle transaction pour brouiller les pistes. Imaginez un hélicoptère poursuivant une voiture rouge passant soudainement dans un tunnel. Et que 10 voitures rouges ressortent de l’autre côté du tunnel. Laquelle suivre ?…

« Un seul coinjoin a rendu 209 BTC fongibles, soit l’équivalent de 6 millions de dollars.
Avec 351 inputs et 336 outputs, provenant de Dieu sait combien d’utilisateurs.
Vous pouvez être sceptique sur les outils de confidentialité du bitcoin, mais vous ne pouvez pas ignorer ceci.
Merci @mempool pour les superbes images. »

Voilà en essence ce qu’est une transaction coinjoin. Rompre le lien entre les transactions permet de créer de la « plausible deniability », comme disent les anglosaxons.

L’objectif est d’augmenter la probabilité d’incertitude pour ne plus pouvoir dire si des bitcoins ont été dépensés ou simplement déplacés vers d’autres adresses appartenant à la même personne.

La controverse

L’accès au coinjoin de Wasabi ne sera pas ouvert à tous. Les BTC seront filtrés. Et cela grâce à l’aide de Chainalysis qui garde la trace de toutes les adresses affiliées à des activités criminelles.

D’où l’accusation par certains de faire un pacte avec l’ennemi, ce qui agace le concurrent Samourai qui s’enorgueillit de ne rien filtrer.

Les mèmes ont fusé ces derniers jours sur Twitter :

Le problème est que recevoir des BTC sales suite à un coinjoin rend impossible leur revente sur les grands exchanges. D’où leur faible succès à cause de ce risque qui est, in fine, une menace pour l’anonymat, diront d’autres.

Philosophiquement, les partisans de Samourai sont d’avis que les coinjoins devraient plutôt servir à « salir » tous les BTC. C’est-à-dire mixer sans filtre dans le but de forcer la main aux exchanges.

Le CEO de zkSNACKs Max Hillebrand (et contributeur wasabi) assume de filtrer les transactions blacklistées par Chainalysis et l’OFAC. Pour lui, il n’y a pas d’incompatibilité avec sa philosophie anarchiste cypherpunk.

Terminons sur une touche positive. Chaque BTC « sale » est un BTC qui ne pourra plus alimenter la pression baissière sur les exchanges. Un mal pour un bien ?

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Nicolas T.

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