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FTX : La crypto se relèvera-t-elle ?

lun 14 Nov 2022 ▪ 16 min de lecture ▪ par Satosh

L’une des destructions de richesses les plus rapides de l’histoire : SBF était le golden boy de FTX il y a encore une semaine. Aujourd’hui c’est un escroc fauché et en cavale. Mais en plus d’avoir volé des milliers de clients sur FTX pour financer ses appartements aux Bahamas, il vient d’anéantir des années d’avancées en matière de légitimation. La crypto restera encore un bout de temps l’industrie de toutes les escroqueries.

FTX : Chroniques d’un énième Ponzi

FTX était jusqu’à la semaine dernière l’un des principaux exchanges crypto. Son fondateur, Sam Bankman-Fried était respecté. Aussi bien à la Maison Blanche, que dans les sphères cryptos pour son génie financier qui lui a permis de devenir extrêmement riche en quelques années.

FTX : out.

Après les révélations de Coindesk sur les états financiers d’Alameda, tout s’est accéléré. La société avait emprunté des sommes considérables en utilisant le FTT en tant collatéral. En effet, le FTT est un jeton artificiel créé à partir de rien par FTX. Un actif hautement volatil et qui pouvait à tout moment s’effondrer dans une spirale de la mort en cas de perte de confiance.

Dans la foulée, CZ, le CEO de Binance a vu une opportunité d’assassiner son principal concurrent en vendant tous ses jetons FTT. Le prix a violemment chuté, ce qui a rendu Alameda insolvable. Par contagion, FTX est elle-même devenue une société insolvable. Ultime humiliation, SBF a été contraint de pratiquer la génuflexion devant le nouveau seigneur de la crypto en le suppliant de racheter sa société zombie.

Ce qu’il ne fera pas. Évidemment.

La crypto : une industrie de marginaux improductifs ?

La première personne vers laquelle s’est tourné le truand SBF est le CEO de Binance, son principal rival : CZ. Celui qui l’a assassiné. Pourquoi ? Parce qu’aucune autre entreprise en dehors de la crypto n’est prête à toucher à de la crypto. La crypto demeure un secteur quasiment autarcique et incestueux.

La différence entre la finance traditionnelle et la crypto, c’est que la finance repose sur des actifs productifs qui génèrent des gains de productivité, d’où découlent les rendements réels. Elle a pour but d’assurer une allocation du capital entre des acteurs qui ont des projets d’investissements plus ou moins prometteurs et des épargnants. Ce sont sur ces fondations intimement liées à l’économie réelle que des produits de plus en plus complexes comme les produits dérivés ont été inventés.

À l’inverse, 99,999 % des jetons cryptos ne reposent pas sur ces fondations réelles. La DeFi n’est à l’heure actuelle qu’un vaste laboratoire où les rendements temporaires sont alimentés par l’argent des VCs et non pas par des actifs productifs. Acheter un machin coin ne finance aucun projet entrepreneurial ayant pour but d’améliorer la réalisation d’une activité productive.

Beaucoup de shitcoins

Deux ou trois actifs révolutionnaires et beaucoup de shitcoins

Heureusement, certains actifs ont une forte valeur et ne sont probablement pas des Ponzis : Bitcoin, Ethereum ou encore certains stablecoins…

Bitcoin, en tant que protocole résistant à la censure sur lequel circule une valeur volatile (BTC) inarrêtable. Ethereum, plateforme commune pour tokeniser des actifs peu liquides comme de l’immobilier ou des œuvres d’art. Les stablecoins en tant que rempart à l’inflation dans les pays pauvres. Les NFT comme passeport digital pour accéder à une communauté privée dans le cyberespace. VitaDAO qui finance la recherche contre le vieillissement. Tout ça a beaucoup de valeur !

Toutefois, l’effondrement dantesque de FTX nous montre que la crypto est loin de devenir mainstream. Puisque la crypto ne bénéficie pas de subventions gouvernementales et qu’elle ne repose pas sur des actifs productifs à financer, une partie substantielle de cette industrie continuera à saigner dans les années à venir.

La fin de l’argent gratuit avec la remontée des taux dissipe l’illusion en révélant au grand jour les fragilités inhérentes à cette industrie.

Comme un air de 2008 (ou presque)

Lorsque la crise de 2008 a ébranlé l’économie mondiale, beaucoup de gens étaient surpris d’apprendre que des banquiers dans des buildings de 50 étages avaient fait des paris risqués avec leur argent. Ils ont également pu être frustrés en voyant le gouvernement renflouer ces mêmes banques avec l’argent de leurs impôts.

« Nous renflouons aujourd’hui les banques, car il y a un risque systémique sur la finance mondiale. Cet effort de solidarité nationale est vital pour éviter que les banques cessent de prêter de l’argent aux entreprises.

Tous ces paris risqués répondaient à des modèles mathématiques sophistiqués mais visiblement nos modèles omettaient certaines variables. Ces prêts hypothécaires titrisés étaient vitaux pour permettre la construction résidentielle et vous permettre à vous, Américains d’avoir une belle maison. Si vous vivez le rêve Américain, c’est grâce à toute l’ingénierie financière de Wall Street.

Alors oui nous sauvons les banques, mais dès demain nous mettrons en place des règles extrêmement dures pour que cette situation ne se reproduise pas. Parole d’élu. »

Pourquoi alors lorsque la deuxième plateforme d’exchanges de crypto fait faillite, aucun politique ne propose d’effort de solidarité nationale pour sauver cette société ?

Primo parce que la crypto cherche à amputer l’Etat de son monopole monétaire là où les connivences entre le Trésor, Wall Street et la Fed sont légion. Deuzio, parce que la crypto ne repose pas sur des mécanismes d’allocation du capital vers des secteurs productifs.

Si AIG fait faillite, les banques cessent de prêter de l’argent aux entreprises et aux consommateurs solvables. Il y a donc moins de maisons construites, ces entreprises font faillite et un nombre conséquent de personnes finissent au chômage.

Pas de bail-out dans la crypto

À l’inverse, si FTX fait faillite, les seules entreprises qui risquent d’être fragilisées … sont les autres sociétés crypto.

Votre coiffeur (qui n’a aucun prêt en BTC) pourra continuer d’emprunter de l’argent auprès de sa banque même si FTX finit dans les abîmes. Il ne finira pas au chômage et continuera de voter Macron au premier tour. Voilà pourquoi personne ne propose de renflouer FTX.

SBF aurait pourtant bien aimé pouvoir bénéficier du système d’assurance des dépôts (ou système de racket à grande échelle du contribuable) dont jouissent les banques et qui les incitent à prendre de plus en plus de risques.

Dans la crypto, les fraudeurs comme Do Kwon ou SBF font faillite. Il n’y a pas de quantitative easing, c’est-à-dire d’injections monétaires qui ont pour effet de diminuer les salaires réels de la classe moyenne et d’augmenter la valeur des appartements luxueux de Londres ou Paris. On ne sauve pas de banquiers dans la crypto : leur fortune s’évapore en 72h et rejoint le néant.

Oui à la police de la crypto, non à la régulation

On voit déjà débarquer les bureaucrates aux cheveux blancs et les banquiers avec leur lot de nouvelles règles pour asphyxier la crypto. Pourtant la faillite de FTX est le résultat d’une fraude et non pas d’un trop grand espace de liberté.

Cela ne relève donc pas de la régulation, mais de la simple défense juridique du droit de propriété et de l’interdiction de la fraude. En utilisant les fonds des clients pour prendre des positions extrêmement risquées, SBF n’a pas respecté le contrat qui le liait aux clients de FTX.

S’attribuer les biens d’autrui est de la fraude. Du vol. Du détournement de fonds.

Le marché libre et le droit des contrats reposent naturellement sur la condamnation du vol, qui est un viol du droit de propriété. Nous avons besoin de forces de polices, pas des règlements d’Aurore Lalucq.

Les truands comme SBF doivent être traduits en justice et les gens doivent être libres d’expérimenter le gambling.

La « régulation » paternaliste n’est pas la solution

La « réglementation » ne fera qu’étouffer l’innovation crypto en tuant les petits et en déplaçant le problème. Les escrocs seront tentés d’inventer des mécanismes frauduleux de plus en plus exotiques.

Oui, il y aura moins de faillites avec un cadre extrêmement contraignant, mais vous anéantissez la liberté d’entreprendre et donc la créativité technologique. C’est comme si un médecin injectait des cellules cancéreuses pour améliorer le taux de cholestérol d’une personne.

FTX.com est d’ailleurs un enfant non désiré de la régulation. En créant un cadre contraignant, la SEC a poussé l’exchange à rejoindre les Bahamas.

La vie est une prise de risque. L’idée paternaliste selon laquelle le gouvernement existe pour nous protéger de nos propres actions ne conduira qu’à empêcher l’entrée de nouveaux entrepreneurs sur le marché crypto, au profit des anciens concurrents plus forts (Binance, Circle, Tether…) et suffisamment riches pour se payer des cabinets d’avocats.

Nous aurions donc le droit de dépenser tout notre argent pour acheter du coca (c’est-à-dire du diabète dans 33cL) mais il nous serait interdit d’acheter des shitcoins ?

Il faut défendre la liberté de perdre son argent dans des shitcoins. Papa gouvernement n’a pas à nous dicter comment dépenser notre argent. Surtout lorsque papa gouvernement est la seule entité sur cette planète à tirer ses revenus de la coercition et non pas d’une activité productive.

Mieux que les cours du MIT : la ruine

Nous apprenons bien plus en perdant de l’argent sur des shitcoins comme le FTT qu’en écoutant les interventions soporifiques de l’improductive Aurore Lalucq. Les cicatrices que l’on accumule en s’exposant à la volatilité de la crypto valent de l’or. Nous n’apprenons que lorsque l’on paie les conséquences de ses choix et de ses prises risques.

Les gens comprendront que déposer ses actifs sur Binance est une opération plus risquée que d’avoir ses clefs sur son Ledger uniquement lorsqu’un jour Binance bloquera les retraits. Ils comprendront qu’investir dans le nouveau shitcoin à la mode n’est pas un investissement rationnel, uniquement lorsqu’ils perdront une partie de leur épargne dans ce casino. Skin in the game.

Au fil du temps, par le biais d’essais et d’erreurs l’écosystème se débarrasse des escrocs et des pigeons. Nous parlons moins des stablecoins algorithmiques adossés à des jetons artificiels depuis l’épisode UST. Et l’on voit déjà les principaux exchanges parler de Proof of Reserve.

C’est l’autorégulation par le marché et la faillite.

L’axe Solana-Wall Street-Washington

N’oublions pas que le truand SBF volait ses clients pour en redistribuer une partie aux démocrates afin qu’ils réglementent davantage la crypto.

Une stratégie qui aurait permis à SBF de continuer à voler ses clients et de s’asseoir sur sa position dominante sans avoir à subir de pression concurrentielle. Le golden boy militait activement auprès de Tonton Gensler pour avoir le marché américain à lui tout seul.

Le capitalisme de copinage dans toute sa grâce.

L’axe Solana-Wall Street-Washington est vraiment une abomination.

Le Proof of reserve : une avancée vers la transparence

Quelque chose qui pourrait réellement apporter de la confiance dans l’écosystème crypto est la généralisation du Proof of Reserve. Il s’agit de permettre à des sociétés qui gèrent la custody de produire régulièrement des preuves cryptographiques démontrant qu’ils disposent de la totalité des actifs de leurs clients.

Un tel mécanisme permet à un exchange de prouver publiquement sa solvabilité en étant transparent sur l’état de ses actifs et de ses passifs. Apporter la preuve que l’on n’utilise pas de réserves fractionnaires. Les utilisateurs savent alors que leurs soldes ne sont pas qu’une ligne sur un fichier Excel, mais qu’ils reposent bien sur des actifs réels détenus par la plateforme. Dans l’idéal, le proof of reserve permettrait à chaque client de vérifier individuellement la possession de ses actifs par l’exchange.

Pour ce faire, un auditeur (comme Armanino) doit engager sa responsabilité pour attester de la véracité de l’évaluation des comptes.

Les exchanges sérieux passent au PoR

Étant donné que 99 % de l’humanité est composée de personnes irresponsables qui sont incapables de reprendre le contrôle de leur épargne (de leur vie en général), on peut en déduire que les investisseurs cryptos n’achèteront pas tous de Ledger et continueront de laisser leurs jetons sur des exchanges.

Soit. À partir de ce constat et si l’industrie a l’ambition d’embarquer des milliards d’individus, les exchanges doivent le plus possible être transparents et sûrs. Dans cette perspective, le PoR est une piste pertinente.

Toutefois, soyons honnêtes, le Proof of reserve ne règle pas tous les problèmes. Un exchange peut tout à fait avoir un passif caché qui n’apparaît pas à travers une simple analyse de flux de trésorerie. En cas de faillite, il se pourrait alors que les clients possédants des actifs sur la plateforme ne soient pas prioritaires par rapport aux créanciers.

Si un exchange souhaite apporter le plus de confiance possible, il aurait intérêt à adopter une politique juridique dans laquelle les clients sont prioritaires par rapport aux créanciers.

Cette autorégulation des exchanges est préférable à la « régulation » étatique des bureaucrates : coûteuse, inefficace et contre-productive.

Être paranoïaque pour survivre

La crypto est une industrie parasitée par des sociétés insolvables, toujours plus créatives pour inventer de nouveaux supers Ponzis. C’est pourquoi, pour survivre dans cet écosystème, il faut être extrêmement parano. Il y a peu d’industries où l’on peut créer un Ponzi aussi facilement. C’est pourquoi la crypto attire les pires parias.

Vous pouvez raisonnablement considérer que tout exchange qui ne pratique pas dès aujourd’hui le proof of reserve est une société insolvable, intrinsèquement en faillite. Kraken pratique déjà le Proof of Reserve. Binance, OKX, Kucoin, Huobi et Poloniex ont annoncé son intégration.

Partez du principe que tous les exchanges ont fondé leur business sur la tromperie. Rien n’est « too big to fail » dans la crypto. Vous êtes prévenus. Continuer à investir sur ces plateformes revient à rejoindre volontairement le Titanic après qu’il ait heurté un iceberg. Un risque considérablement élevé, qui s’apparente à de la folie (ou de la stupidité).

Même Binance pourrait faire faillite. Lorsque vous êtes un exchange, la tentation est trop forte pour ne pas pratiquer les réserves fractionnaires. Les hommes ont toujours eu la tentation démiurgique de créer des choses à partir de rien.

Or le système des réserves fractionnaires repose sur le postulat que vous inspirez suffisamment confiance pour que vos clients ne viennent pas réclamer simultanément leurs fonds. Dans ce cas, l’illusion se dissipe.

L’empereur du mal SBF a terni l’image de l’industrie crypto en escroquant ses clients. Il faut s’attendre à un nouveau putsch réglementaire. Beaucoup de shitcoins disparaîtront. L’heure de revenir aux fondamentaux : Bitcoin, Ethereum, Ledger.

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Satosh

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