29 milliards de dollars pour Musk : Tesla tente de le retenir coûte que coûte

Tandis que l’avenir de Tesla se joue autant en bourse qu’en justice, son conseil d’administration vient d’accorder à Elon Musk 96 millions d’actions, soit 29 milliards de dollars. Ce choix spectaculaire intervient alors que l’entreprise traverse une zone de turbulences. Loin d’un simple bonus, cette décision révèle une dépendance assumée à un dirigeant autant admiré que controversé. Tesla mise sur Musk, coûte que coûte, au risque d’exacerber les tensions entre pouvoir individuel et intérêt collectif.

Une contre-offensive salariale face à la justice américaine

Le conseil d’administration de Tesla a validé début août une attribution exceptionnelle de 96 millions d’actions à Elon Musk, valorisées à environ 29 milliards de dollars, alors qu’il s’était lancé dans une opération de survie XXL.

Cette décision intervient après l’invalidation par un tribunal du Delaware de son précédent plan de rémunération de 2018, qui atteignait plus de 50 milliards de dollars.

Le tribunal a estimé que ce plan avait été approuvé dans des conditions jugées inéquitables pour les actionnaires, en raison de la proximité entre Musk et plusieurs membres du conseil. L’entrepreneur a fait appel, dénonçant « de nombreuses erreurs de droit » dans le jugement.

Pour sécuriser l’avenir managérial de l’entreprise, un comité spécial a été mandaté pour étudier une nouvelle forme de compensation, débouchant sur la proposition actuelle.

Les éléments concrets de ce nouveau plan révèlent à la fois un effort de légitimation vis-à-vis des précédentes critiques et une tentative manifeste de retenir Musk à la tête de l’entreprise. Voici les informations essentielles :

• Le montant total de la prime : environ 29 milliards de dollars en actions (96 millions de titres) ;

• Une condition financière : Musk devra s’acquitter de 23,34 dollars par action, soit le prix d’exercice prévu dans le plan initial de 2018 ;

• L’objectif déclaré : « garantir la présence continue d’Elon Musk à la tête de Tesla », selon les termes du comité spécial ;

• La justification stratégique : répondre à l’annulation du plan précédent tout en assurant la stabilité managériale de Tesla ;

• Un silence sur les conditions de performance : Tesla n’a pas communiqué de nouveaux objectifs ou seuils à atteindre en échange de cette attribution.

Cette manœuvre s’intègre dans une stratégie de réponse rapide à l’incertitude juridique, tout en envoyant un signal fort aux marchés : Elon Musk reste, pour Tesla, l’élément central autour duquel tout gravite.

Un levier de pouvoir pour garder le cap avec Musk

Au-delà de la compensation financière, l’attribution de ces 96 millions d’actions apparaît comme un outil pour accroître l’influence de Musk sur les décisions stratégiques de Tesla. Le comité spécial l’affirme sans détour : cette mesure est aussi conçue pour « augmenter progressivement le pouvoir de vote d’Elon Musk ».

Aujourd’hui actionnaire à hauteur de 13 %, Musk pourrait renforcer sa capacité à diriger l’entreprise selon sa vision, dans un contexte où ses autres engagements, que ce soit chez SpaceX, X (ex-Twitter) ou via son IA Grok, alimentent les inquiétudes sur sa concentration réelle au sein de Tesla.

Le constructeur, de son côté, justifie cette centralisation par les mutations en cours dans sa stratégie. Tesla se réoriente progressivement : des véhicules électriques abordables vers les robotaxis autonomes et les robots humanoïdes.

Le comité estime « qu’il est essentiel de maintenir Elon concentré sur la mission de Tesla », notamment face à la montée des projets transversaux. Ce virage, s’il aboutit, redéfinira Tesla, mais aussi le rôle de Musk dans le paysage technologique global.

En s’adossant une nouvelle fois à son PDG fondateur, Tesla fait le choix de la continuité, mais aussi celui d’un modèle de gouvernance ultra-personnalisé, où le leadership de Musk prime sur les mécanismes classiques de contrôle. Cette stratégie pourrait rassurer les marchés à court terme, mais interpelle à plus long terme sur la soutenabilité d’un tel système. Entre opportunité visionnaire et dépendance structurelle, l’avenir de Tesla, déjà en demi-teinte avec une perte de 70 % de ses bénéfices, se jouera peut-être autant sur la route de l’innovation que dans les coulisses de sa gouvernance.