Adam Back calme les peurs autour du Bitcoin et du quantique
Tandis que l’ombre de l’ordinateur quantique plane sur la sécurité numérique, le bitcoin pourrait-il vraiment vaciller ? Face à l’hypothèse d’un réseau rendu vulnérable par des machines capables de briser le SHA‑256, les opinions divergent. Certains anticipent une menace imminente, d’autres temporisent. Parmi eux, Adam Back, figure du mouvement cypherpunk et PDG de Blockstream, invite à nuancer. Sa lecture, à la fois technique et stratégique, repositionne le débat sur des bases concrètes, loin des scénarios catastrophes, tout en posant les vraies questions sur la résilience future du protocole.

En bref
- Adam Back affirme que Bitcoin ne risque rien face à l’informatique quantique avant 20 à 40 ans.
- Le cryptographe souligne que des solutions post-quantiques certifiées existent déjà et peuvent être intégrées à temps.
- Le seuil critique pour casser le SHA-256 est estimé à 8 000 qubits logiques, très loin des capacités actuelles.
- Les ordinateurs quantiques d’aujourd’hui restent trop bruyants ou insuffisamment puissants pour menacer la cryptographie du Bitcoin.
Adam Back rassure : le bitcoin ne risque rien avant plusieurs décennies
Pendant que la menace se rapproche à petits pas, Adam Back a livré une réponse directe au cours de son interpellation le 15 novembre sur X à propos de la possible vulnérabilité du bitcoin face à l’informatique quantique : « probablement pas avant 20 à 40 ans ».
Pour le PDG de Blockstream, cité dans le whitepaper de Satoshi Nakamoto, les craintes liées à un effondrement cryptographique sont, à ce stade, largement prématurées. Il précise que des algorithmes de cryptographie post-quantique validés par le NIST existent déjà et pourraient être intégrés « bien avant l’arrivée d’ordinateurs quantiques capables de casser les systèmes cryptographiques ».
Ces déclarations font suite à une vidéo de Chamath Palihapitiya affirmant que le bitcoin pourrait être compromis dans un délai de deux à cinq ans. Une prédiction qu’Adam Back rejette, en s’appuyant sur l’état actuel du matériel quantique, encore loin d’atteindre le seuil critique.
Pour illustrer l’écart entre les capacités actuelles des ordinateurs quantiques et les exigences techniques pour menacer le bitcoin, plusieurs éléments concrets sont avancés :
- Casser le SHA-256, la base de la sécurité du bitcoin, nécessiterait environ 8 000 qubits logiques. Il ne s’agit pas de simples qubits physiques, mais de qubits extrêmement stables et corrigés d’erreurs.
- Le record actuel est détenu par Caltech avec 6 100 qubits physiques, bien insuffisants pour mener une attaque viable. Cette machine ne peut même pas casser RSA-2048, qui demande environ 4 000 qubits logiques dans un modèle théorique parfait.
- La correction d’erreurs est un obstacle majeur : par exemple, Quantinuum a atteint 98 qubits physiques, mais cela n’a permis de produire que 48 qubits logiques réellement exploitables.
- Du côté des systèmes à portes quantiques universelles, Atom Computing a dépassé la barre des 1 000 qubits physiques, sans pour autant approcher une capacité exploitable en cryptanalyse à grande échelle.
Autrement dit, l’écart technologique reste abyssal. Et selon Adam Back, le bitcoin dispose de temps pour réagir, mais aussi des outils cryptographiques nécessaires pour anticiper sans précipitation.
Une vulnérabilité indirecte, mais déjà présente
Si la menace directe d’une attaque quantique sur le bitcoin semble aujourd’hui largement prématurée, certains chercheurs insistent sur un autre danger plus insidieux : celui du stockage de données chiffrées dans l’optique de les décrypter ultérieurement, une stratégie connue sous le nom de « récolter maintenant, déchiffrer plus tard ».
Gianluca Di Bella, spécialiste des smart contracts et des preuves à divulgation nulle de connaissance (zero-knowledge proofs), estime que cette menace devrait déjà nous pousser à agir : « nous devrions migrer dès maintenant », affirme-t-il. Pour lui, même si l’ordinateur quantique commercial est encore à dix ou quinze ans , « de grandes institutions comme Microsoft ou Google pourraient disposer d’une solution d’ici quelques années », souligne-t-il, suggérant que la course à la suprématie quantique pourrait s’accélérer plus rapidement que prévu.
Cette stratégie d’attaque, bien qu’inopérante sur le modèle du bitcoin, où la sécurité repose sur la possession de clés privées et non sur la confidentialité des données, concerne un éventail beaucoup plus large de communications chiffrées. Elle pourrait avoir des conséquences dramatiques dans des contextes politiques ou géopolitiques sensibles. Un dissident, par exemple, protégé aujourd’hui par un chiffrement asymétrique, pourrait voir ses données compromises dans une décennie si elles ont été interceptées aujourd’hui par une entité disposant ultérieurement d’un ordinateur quantique capable de les lire.
Ainsi, une interrogation émerge sur la gouvernance technologique et la souveraineté numérique. Si les standards post-quantiques sont d’ores et déjà validés, quand et comment seront-ils intégrés aux protocoles existants ? Qui en pilotera l’implémentation ? Et surtout, les utilisateurs du bitcoin seront-ils prêts à consentir aux éventuelles modifications techniques requises ? À mesure que les géants du cloud, de l’IA, et du Web3 investissent dans le quantique, la question de la migration post-quantique se pose comme un impératif de long terme, mais dont la temporalité reste incertaine.
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Diplômé de Sciences Po Toulouse et titulaire d'une certification consultant blockchain délivrée par Alyra, j'ai rejoint l'aventure Cointribune en 2019. Convaincu du potentiel de la blockchain pour transformer de nombreux secteurs de l'économie, j'ai pris l'engagement de sensibiliser et d'informer le grand public sur cet écosystème en constante évolution. Mon objectif est de permettre à chacun de mieux comprendre la blockchain et de saisir les opportunités qu'elle offre. Je m'efforce chaque jour de fournir une analyse objective de l'actualité, de décrypter les tendances du marché, de relayer les dernières innovations technologiques et de mettre en perspective les enjeux économiques et sociétaux de cette révolution en marche.
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