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Commerce mondial : La Chine lâche un privilège stratégique à l’OMC

9h00 ▪ 5 min de lecture ▪ par Luc Jose A.
S'informer Géopolitique

La Chine annonce qu’elle renonce à une partie de ses privilèges à l’OMC. Ce geste, qualifié de « majeur » par la directrice générale de l’organisation, Ngozi Okonjo-Iweala, rebat les cartes du commerce mondial. Formulée par Li Qiang en personne, cette décision marque un virage stratégique pour les autorités de Pékin, longtemps accusées de profiter indûment des règles multilatérales.

Commerce mondial : La Chine lâche un privilège stratégique à l’OMC

En bref

  • La Chine annonce son intention de renoncer à certains privilèges commerciaux accordés par l’OMC aux pays en développement.
  • Cette décision, saluée comme « majeure » par la directrice générale de l’OMC, marque un tournant stratégique dans la posture internationale de Pékin.
  • Jusqu’ici, la Chine bénéficiait d’avantages clés comme des délais prolongés, des subventions industrielles et un accès facilité aux marchés développés.
  • La Chine abandonne ces privilèges tout en maintenant son statut de pays en développement, qu’elle juge essentiel à son équilibre économique.

Pékin abandonne un levier majeur de compétitivité commerciale

Lors d’un discours prononcé ce mardi 23 septembre en marge de l’Assemblée générale des Nations Unies, Li Qiang, Premier ministre chinois, a officiellement annoncé que la Chine était prête à renoncer au « traitement spécial et différencié » (TSD) prévu pour les pays en développement dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce, alors que le pays déploie toujours son offensive monétaire contre la domination du dollar.

Cette déclaration a été saluée comme un « événement majeur » par Ngozi Okonjo-Iweala, directrice générale de l’OMC, qui a déclaré sur X : « c’est l’aboutissement de nombreuses années de travail acharné, et je tiens à féliciter les dirigeants chinois pour leur action dans ce domaine ! ».

Une telle décision constitue une rupture avec la ligne dure défendue par Pékin depuis son adhésion à l’OMC en 2001.

Ce changement d’attitude implique pour la Chine l’abandon de plusieurs mécanismes clés qui l’ont soutenue dans sa stratégie d’industrialisation accélérée. En tant que pays bénéficiant du TSD, la Chine disposait jusqu’ici de plusieurs avantages structurels dans la compétition économique mondiale, tels que listés par Thomas Deconstanza, chercheur au think tank Skema Publika :

  • Des délais prolongés pour appliquer certaines règles de l’OMC, lui permettant de retarder l’alignement de ses politiques économiques ;
  • La possibilité de subventionner massivement ses industries stratégiques, notamment dans les secteurs des hautes technologies comme les véhicules électriques ;
  • Un accès facilité aux marchés développés, tels que l’Union européenne ou les États-Unis, sans être soumis à certaines contreparties imposées aux économies plus avancées.

Ces mesures, désormais en voie d’abandon, constituaient un socle de la politique commerciale chinoise. Leur suppression signale une inflexion stratégique majeure, dans un contexte où Pékin cherche à redéfinir son rôle dans les institutions internationales sans perdre les leviers de son influence économique.

Un revirement diplomatique de la Chine sous la pression internationale

Si cette décision peut sembler volontaire, elle intervient dans un contexte de fortes tensions diplomatiques et d’accusations croissantes portées à l’encontre de la Chine depuis plusieurs années.

Le point de bascule remonte au premier mandat de Donald Trump, qui dénonçait dès 2017 un usage « abusif » des règles commerciales multilatérales par Pékin, rappelant que la Chine était depuis 2010 la deuxième économie mondiale en PIB global.

Cette critique a depuis été reprise, et intensifiée, par plusieurs puissances, notamment l’Union européenne, la Corée du Sud, le Japon et l’Australie, qui considèrent qu’il est injustifié pour un acteur de cette envergure de continuer à bénéficier des traitements de faveur réservés aux pays à faible revenu.

En réponse, Pékin a progressivement assoupli sa position. Dès juillet 2024, la Chine, un membre de l’alliance des BRICS, laissait entendre qu’elle pourrait renoncer au TSD lors des prochaines négociations sur la réforme de l’organisation.

Néanmoins, la Chine ne renoncera pas à son statut de pays en développement, jugé « non négociable ». Ce maintien est justifié, selon ses autorités, par les inégalités socio-économiques internes, notamment un PIB par habitant encore bas et des zones rurales en retard en matière de développement. L’abandon du TSD est donc présenté comme un compromis stratégique, un geste d’ouverture sans aller jusqu’à compromettre son positionnement global.

Cette annonce suffira-t-elle à désamorcer les tensions commerciales croissantes, notamment avec les États-Unis, ou si elle ouvre simplement la voie à un rééquilibrage temporaire des rapports de force au sein de l’OMC ? Pour les observateurs, en desserrant l’étau de la critique internationale, la Chine cherche à reprendre l’initiative dans les négociations futures. Cependant, les conséquences concrètes de ce retrait, sur ses industries subventionnées, les chaînes de valeur mondiales, ou encore sur les régulations à venir, restent à mesurer.

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Luc Jose A.

Diplômé de Sciences Po Toulouse et titulaire d'une certification consultant blockchain délivrée par Alyra, j'ai rejoint l'aventure Cointribune en 2019. Convaincu du potentiel de la blockchain pour transformer de nombreux secteurs de l'économie, j'ai pris l'engagement de sensibiliser et d'informer le grand public sur cet écosystème en constante évolution. Mon objectif est de permettre à chacun de mieux comprendre la blockchain et de saisir les opportunités qu'elle offre. Je m'efforce chaque jour de fournir une analyse objective de l'actualité, de décrypter les tendances du marché, de relayer les dernières innovations technologiques et de mettre en perspective les enjeux économiques et sociétaux de cette révolution en marche.

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