Les frais de transaction Bitcoin s’écroulent !

Derrière l’apparente stabilité du Bitcoin, un déséquilibre menace la pérennité du réseau. Depuis avril, les frais de transaction ont chuté de plus de 80 %, ébranlant le modèle de rémunération des sociétés de mining. En pleine montée en puissance des ETF et après un halving exigeant, c’est l’économie interne du bitcoin qui vacille. Moins de frais, moins d’incitations, plus de risques pour la sécurité du protocole, la crise est là, structurelle, et pose une question que l’écosystème ne peut plus ignorer.

L’effondrement du marché des frais

Depuis le halving d’avril 2024, la récompense par bloc a été divisée par deux, tombant à 3,125 BTC, alors que les émotions prennent le dessus sur le marché du bitcoin. Pour maintenir la sécurité du réseau, le protocole s’appuie désormais bien plus sur les frais de transaction comme incitation économique pour les spécialistes du mining.

Or, ce mécanisme connaît une chute brutale. D’après le rapport de Galaxy Digital, les frais de transaction ont plongé de plus de 80 % depuis avril, menaçant directement la viabilité financière de l’activité de mining.

Les données sont préoccupantes :

• Près de 15 % des blocs sont aujourd’hui minés quasi gratuitement, c’est-à-dire avec des frais d’un satoshi par vByte ou moins ;

• La capacité du mempool reste largement sous-utilisée, signe d’un réseau qui peine à attirer de l’activité on-chain ;

• Environ 50 % des blocs récents ne sont même pas pleins, un niveau historiquement bas qui traduit une forte baisse de la demande ;

• L’engouement pour les Ordinals et Runes, qui avait provoqué une explosion des transactions OP_RETURN, s’est effondré : ces dernières ne représentent plus que 20 % du volume journalier, contre plus de 60 % à leur apogée en 2024 ;

• Les ETF Bitcoin au comptant, désormais largement adoptés, ont absorbé plus de 1,3 million de BTC, entraînant une délocalisation du volume vers des structures offchain qui ne génèrent aucun frais pour les professionnels du mining ;

• Pendant ce temps, des blockchains alternatives comme Solana attirent les usages à forte fréquence, notamment les memecoins ou les NFT, contribuant à détourner davantage d’activité transactionnelle hors du bitcoin.

Cette combinaison d’un halving sévère, d’un effondrement des frais, d’une baisse de l’activité et d’une migration vers des alternatives met une pression inédite sur l’économie du bitcoin. La question centrale demeure : dans ces conditions, les sociétés de mining auront-elles encore intérêt à sécuriser le réseau sur le long terme ?

BTCfi, un pari sur l’avenir ou un simple mirage ?

Face à cette crise des frais, certains voient dans la montée en puissance du BTCfi, la finance décentralisée native au bitcoin, une solution potentielle.

Contrairement à Ethereum ou Solana, où la DeFi repose sur des contrats intelligents internes, le BTCfi s’appuie directement sur le bitcoin comme actif sous-jacent.

« Chaque action BTCfi nécessite de déplacer des bitcoins », souligne Pierre Samaties, directeur des opérations chez Dfinity Foundation. Ce mouvement déclenche des calculs, lesquels consomment de l’espace de bloc, et cet espace a un coût. Autrement dit, plus les applications BTCfi gagnent en usage, plus les frais générés sur le réseau augmentent.

Julian Mezger, directeur marketing chez Liquidium, insiste sur le fait que l’infrastructure du bitcoin a profondément évolué ces dernières années. « En cinq ans, elle est passée d’un simple protocole de règlement à un écosystème multicouche », estime-t-il.

Cette transformation poserait les bases d’une DeFi propre au bitcoin, capable de soutenir des activités de prêt, d’échange ou de génération de rendement, tout en stimulant l’activité on-chain. Si cette trajectoire se confirme, le bitcoin pourrait sortir de son rôle traditionnel d’or numérique pour devenir une infrastructure financière de base, c’est-à-dire une brique essentielle et programmable des systèmes financiers décentralisés.