BRICS : Pourquoi aucun soutien militaire à l’Iran ?
Tandis que les frappes israéliennes visent les sites sensibles iraniens et que Téhéran répond par des missiles sur Tel-Aviv, l’escalade militaire redéfinit les équilibres au Moyen-Orient. Cependant, une absence stratégique intrigue : celle des BRICS. Nouvel arrivant dans le bloc, l’Iran misait sur un appui solide face à son ennemi juré. Or ni Moscou, ni Pékin, ni New Delhi ne s’engagent. Ce silence met à nu les limites d’une alliance que Téhéran voyait comme un contrepoids à l’hégémonie occidentale.
En bref
- Le conflit entre l’Iran et Israël s’intensifie, avec des frappes militaires inédites de part et d’autre.
- Malgré son adhésion récente aux BRICS, l’Iran se retrouve seul face à l’escalade militaire.
- La Russie condamne Israël mais refuse tout soutien militaire à Téhéran, invoquant un partenariat sans clause de défense mutuelle.
- Les autres membres des BRICS, comme la Chine et l’Inde, évitent toute implication, chacun privilégiant ses intérêts stratégiques.
Un soutien diplomatique sans portée militaire
Alors que le spectre d’une guerre totale se confirme, la Russie, pourtant considérée comme le partenaire stratégique le plus engagé auprès de l’Iran, a rejeté toute idée d’intervention militaire dans le conflit actuel.
Dans un communiqué publié par le Kremlin, Vladimir Poutine a certes exprimé sa « condamnation des actions israéliennes, menées en violation de la Charte des Nations unies et du droit international », et a présenté ses « condoléances au peuple iranien pour les nombreuses victimes ».
Il s’est entretenu par téléphone avec le président iranien Masoud Pezeshkian et le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, appelant à la désescalade. Cependant, cette posture s’est rapidement accompagnée d’une clarification. Malgré la signature récente d’un « Traité de Partenariat Stratégique », la Russie n’entend pas apporter un quelconque appui militaire à Téhéran.
Ce traité, signé en janvier 2025 et ratifié au printemps, ne contient aucune clause de défense mutuelle. Il se limite à l’engagement de ne pas soutenir les ennemis de l’autre partie.
Les raisons de cette prudence sont multiples et ancrées dans la stratégie diplomatique de Moscou. À ce jour, la Russie se limite à une posture d’équilibriste géopolitique, pour préserver à la fois ses intérêts régionaux et ses marges de manœuvre face à l’Occident. Concrètement :
- Le traité russo-iranien n’est pas un pacte militaire et ne prévoit aucune clause d’assistance en cas d’agression ;
- Moscou reste mobilisé par la guerre en Ukraine et évite d’ouvrir un second front, surtout contre Israël, puissance militaire et nucléaire ;
- Le Kremlin cherche à maintenir un dialogue avec Washington, notamment à travers son rôle de médiateur potentiel dans ce conflit ;
- Vladimir Poutine a proposé à plusieurs reprises de faciliter un retour à la table des négociations, une option que Donald Trump a publiquement saluée.
En somme, derrière le langage diplomatique et les condamnations verbales, la Russie refuse de traduire son partenariat stratégique avec l’Iran en engagement militaire concret. Ce positionnement tactique vise à contenir l’escalade, mais place de facto Téhéran dans une position de vulnérabilité face à Israël.
Les BRICS à l’épreuve de leurs contradictions géopolitiques
Si Téhéran pouvait espérer un appui collectif de l’alliance des BRICS, les attentes se sont heurtées à la réalité. Le 16 juin, le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Esmaeil Baqaei, déclarait :
Nous espérons que les BRICS adopteront une position, reconnaissant la réalité dans notre région, où un régime criminel a lancé une attaque armée illégale contre un autre pays.
Toutefois, si l’Organisation de Coopération de Shanghai (OCS) a condamné les frappes israéliennes, les BRICS, eux, n’ont publié aucune déclaration unifiée. Les divergences profondes entre les membres freinent toute réaction concertée en coulisses.
En effet, la Chine, bien que proche de l’Iran sur le plan énergétique, ne souhaite pas s’impliquer dans un conflit qui pourrait perturber ses échanges commerciaux globaux. De son côté, l’Inde se tient à distance de toute hostilité vis-à-vis d’Israël, avec qui elle entretient une coopération sécuritaire étroite.
Ce silence diplomatique illustre une réalité structurelle : les BRICS ne constituent pas une alliance de sécurité. Ainsi, contrairement à l’OTAN, le groupe n’a ni doctrine militaire commune ni mécanismes d’intervention coordonnée.
Chaque État défend ses propres intérêts nationaux, souvent contradictoires, surtout en matière de politique étrangère. L’Iran, en rejoignant le groupe en janvier dernier, comptait sur une solidarité idéologique face à l’Occident. Cependant, la réalité est plus pragmatique. À ce stade, aucun des poids lourds du bloc ne semble prêt à compromettre ses relations bilatérales avec Israël ou les États-Unis pour défendre Téhéran.
Ce manque de réaction pose la question de la crédibilité politique des BRICS. S’il reste un forum puissant de contestation du modèle occidental, surtout en matière économique comme en témoigne le désengagement massif des actifs US, son incapacité à agir en situation de crise majeure pourrait à terme limiter sa portée stratégique. Pour l’Iran, l’isolement est brutal. Il subit une offensive militaire d’envergure, mais il se retrouve aussi sans levier diplomatique solide pour mobiliser ses alliés. À moins d’un changement de posture, peu probable, Téhéran devra faire face seul à l’escalade.
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Diplômé de Sciences Po Toulouse et titulaire d'une certification consultant blockchain délivrée par Alyra, j'ai rejoint l'aventure Cointribune en 2019. Convaincu du potentiel de la blockchain pour transformer de nombreux secteurs de l'économie, j'ai pris l'engagement de sensibiliser et d'informer le grand public sur cet écosystème en constante évolution. Mon objectif est de permettre à chacun de mieux comprendre la blockchain et de saisir les opportunités qu'elle offre. Je m'efforce chaque jour de fournir une analyse objective de l'actualité, de décrypter les tendances du marché, de relayer les dernières innovations technologiques et de mettre en perspective les enjeux économiques et sociétaux de cette révolution en marche.
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