Dette US : Les choix économiques de Pékin inquiètent les marchés
Les relations économiques entre Pékin et Washington sont faites de remous, d’accords temporaires, et de désillusions récurrentes. Dernier exemple : la suspension des hausses de tarifs douaniers pour une durée de 90 jours. Mais cette pause diplomatique n’offre aucune garantie de stabilité durable pour l’économie mondiale. D’ailleurs, la Chine vient d’envoyer un signal aux allures de provocation monétaire. En mars, elle a massivement réduit ses avoirs en dette américaine. Une décision qui risque de relancer les tensions.
En bref
- La Chine vend 18,9 milliards de dollars de dette US et glisse au 3e rang mondial.
- Le Royaume-Uni dépasse Pékin en créances, montant à 779,3 milliards de dollars détenus.
- Moody’s rétrograde la note des États-Unis, déclenchant des inquiétudes sur la soutenabilité budgétaire américaine.
- L’économie chinoise préfère désormais raccourcir ses maturités et diversifier ses réserves discrètement.
Pékin lâche du lest sur les bons du Trésor
En mars 2025, la Chine a cédé près de 19 milliards de dollars de bons du Trésor américain. Son portefeuille est passé de 784,3 à 765,4 milliards de dollars. Cette baisse significative intervient dans un climat de méfiance, sur fond de guerre tarifaire avec les États-Unis. Même si l’administration Trump a suspendu une partie de ses surtaxes pour 90 jours, la confiance reste entamée.
La Chine descend ainsi à la troisième place des créanciers étrangers des États-Unis. Le Royaume-Uni la devance désormais, avec un portefeuille estimé à 779,3 milliards de dollars. En tête, on retrouve le Japon, toujours détenteur de plus de 1 130 milliards de dollars d’obligations américaines.
Mais il ne s’agit pas d’un simple repositionnement. Pour de nombreux analystes chinois, cette décision vise à se protéger d’une économie américaine trop imprévisible. Yu Yongding, ancien conseiller à la banque centrale de Chine, déclare :
La Chine doit élaborer une série de contre-mesures grâce à des scénarios répétitifs. Elle doit protéger la sécurité de ses actifs à l’étranger.
Ce mouvement stratégique intervient aussi au moment où Moody’s a rétrogradé la note de la dette souveraine américaine de « AAA » à « Aa1 ». Un signal que les États-Unis peinent à maîtriser leur propre trajectoire budgétaire. Dans ce contexte, Pékin pourrait être tenté de remodeler sa stratégie d’exposition au dollar.
Diversifier, raccourcir, repositionner : l’économie chinoise en repli stratégique
Ce désengagement relatif n’est pas synonyme de rupture. Brad Setser, ex-fonctionnaire du Trésor américain, analyse ainsi le geste chinois : « Je pense que la Chine cherche à réduire la durée plutôt qu’à quitter le dollar ». En d’autres termes, Pékin préfère des bons à court terme, plus liquides, aux obligations de long terme plus volatiles.
Cette décision s’inscrit dans une logique de réduction des risques. Dans un monde où les tensions géopolitiques s’intensifient, l’économie chinoise ne peut se permettre une dépendance excessive à l’égard d’un seul émetteur, fût-il américain.
Les données de mars révèlent également une montée en puissance des autres acteurs :
- Japon : +22 milliards, avec un total de 1 130 milliards de dollars ;
- Canada : +20,1 milliards, atteignant 426,2 milliards ;
- Belgique : +7,4 milliards, pour 402,1 milliards (incluant des comptes chinois) ;
- Îles Caïmans : +37,5 milliards, totalisant 455,3 milliards.
En parallèle, l’indice Bloomberg Dollar Spot a chuté de 1,8 % en mars, accentuant la volatilité sur les marchés. Par ailleurs, les rendements des bons à 10 ans sont passés de 3,86 % à 4,59 % au cours du mois suivant.
Malgré la détente récente après un accord commercial avec le Royaume-Uni et une rencontre bilatérale sino-américaine, l’instabilité reste vive. Car même si les statistiques montrent une hausse globale des avoirs étrangers (+233 milliards en mars), la méfiance à l’égard de la politique économique américaine ne faiblit pas.
L’économie mondiale sous pression : un signal à plusieurs lectures
La baisse des avoirs chinois en dette américaine agit comme un thermomètre du climat économique international. Pékin ne quitte pas les marchés US, mais ajuste méthodiquement ses positions – quoi qu’il est craint pour une éventuelle prise de contrôle du bitcoin. L’économie mondiale pourrait y voir un prélude à d’autres arbitrages futurs, plus radicaux.
Cette transition se lit à travers cinq indices clés :
- $27,6 milliards : le montant net des ventes chinoises en obligations à long terme ;
- 20 ans : c’est la première fois depuis deux décennies que le Royaume-Uni dépasse la Chine ;
- $9 050 milliards : le total des avoirs étrangers en bons du Trésor (record absolu) ;
- 5 % : poids des actifs chinois rapporté au PIB américain ;
- 90 jours : durée de la trêve tarifaire sino-américaine décidée récemment.
Ce mouvement chinois ne perturbe pas encore violemment le marché. Mais il envoie un message : Pékin peut, à tout moment, modifier ses leviers monétaires en réponse à une attaque tarifaire ou politique. Certains analystes voient dans cette décision un test de résistance : jusqu’où les États-Unis peuvent-ils dépendre de la bonne volonté de leurs créanciers ?
En plus de cela, les réserves étrangères de la Chine continuent de croître via des canaux discrets, comme les grandes banques d’État. Ces opérations échappent en partie au radar des statistiques du Trésor US (données TIC), compliquant toute lecture claire des flux.
La réduction des bons du Trésor par la Chine résonne comme une alerte discrète mais puissante. Chez BlackRock, certains stratèges estiment que Pékin pourrait s’orienter vers l’or ou les cryptomonnaies comme solutions de repli. Car dans une économie mondialisée en perpétuelle tension, l’indépendance monétaire devient un outil stratégique, presque vital.
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