La Chine mise sur le yuan numérique pour contrer l'hégémonie du dollar
Il fut un temps, pas si lointain, où Donald Trump tonnait : tout pays osant bâtir un avenir sans dollar serait puni par une avalanche de droits de douane. Taxer, sanctionner, isoler : tel était l’avertissement à quiconque déviait de l’axe vert. Mais au sein des BRICS, la menace sonne creux. La Chine, elle, ne riposte ni par les bombes ni par les missiles. Elle dégaine une autre arme : sa monnaie numérique, le yuan digital ou e‑CNY. Pas une guerre monétaire, mais une autre cartographie de la finance mondiale.
En bref
- Le yuan numérique sert d’outil stratégique à la Chine pour remodeler la finance internationale actuelle.
- La Chine déploie l’e‑CNY à l’échelle régionale via CIPS, UnionPay et mBridge.
- 261 millions d’utilisateurs ont déjà adopté le yuan numérique dans les services publics et commerces chinois.
- Les sanctions occidentales sont contournées grâce au yuan numérique dans le pétrole, l’or et les swaps.
Yuan numérique : la Chine sort sa carte dans la géopolitique financière
À Shanghai, le gouverneur de la Banque centrale de Chine, Pan Gongsheng, a donné le ton. Sur fonds de tensions commerciales avec les USA, il veut bâtir un système monétaire multipolaire. Moins de dollar, plus d’équilibre. Lors du Lujiazui Forum, il affirme :
Développer un système monétaire international multipolaire contribuera à renforcer la stabilité financière globale.
Le cœur du dispositif : un centre international de gestion de l’e‑CNY, adossé au système CIPS, alternative au réseau SWIFT. Des banques comme Standard Bank et First Abu Dhabi Bank y ont déjà adhéré.
Pan dénonce aussi les failles actuelles : « Les infrastructures de paiements transfrontaliers peuvent être politisées et utilisées comme outils de sanctions unilatérales ». La finance n’est plus neutre ; elle devient champ de bataille.
L’e‑CNY permet à la Chine de sécuriser ses transactions, tout en évitant le dollar. C’est une manœuvre économique, mais aussi diplomatique. Car là où les États-Unis isolent, Pékin tisse des liens : Russie, Iran, Golfe persique. La monnaie numérique devient une alternative à l’hégémonie.
Finance liquide : adoption massive et usage quotidien
Dans les rues de Chine, l’e‑CNY est déjà réalité. Plus de 261 millions d’utilisateurs s’en servent, avec un volume cumulé dépassant 7 300 milliards de dollars (Blockhead). Le quotidien s’y convertit : transports, salaires, impôts. Pas besoin de compte bancaire. Un QR code suffit, même hors ligne.
À Jiangsu, les fonctionnaires sont payés en yuan digital. À Chengdu, on l’utilise au marché. Ce n’est plus une expérimentation. C’est un réflexe numérique. Même les touristes y ont droit, via une simple appli mobile.
Mais l’ambition de Pékin dépasse ses frontières. UnionPay, soutenu par la PBoC, déploie des paiements QR en Asie du Sud-Est. Cambodge, Vietnam, Laos : l’écosystème s’exporte. Grâce à mBridge, les transactions entre Hong Kong et Abu Dhabi se règlent en 7 secondes, avec un coût réduit de 98 % (Blockhead).
Sur X, Josh Ryan‑Collins écrit :
Les monnaies numériques des banques centrales pourraient accroître les profits publics issus du seigneuriage.
Plus qu’une techno, le yuan digital devient un levier fiscal et politique.
Finance mondiale : quand Pékin déstabilise l’ordre établi
Le yuan numérique n’est pas qu’un gadget monétaire. C’est un instrument stratégique qui redessine les équilibres dans les zones en quête d’émancipation du dollar. Pékin ne l’affirme pas. Elle le prouve :
- 3ᵉ devise pour les paiements mondiaux, selon SWIFT ;
- 2ᵉ monnaie utilisée pour financer les échanges commerciaux ;
- 38 % des flux commerciaux en Asie se règlent en yuan, contre moins de 10 % il y a dix ans ;
- 5 000 milliards de yuans de swaps de devises activés avec des banques centrales partenaires ;
- Pétrole et or réglés en e‑CNY avec des pays ciblés par des sanctions occidentales.
Mais la route reste sinueuse. Les contrôles de capitaux freinent encore la circulation libre du yuan à l’étranger. Et même si le RMB grimpe, il ne pèse encore que 4 % des réserves mondiales, contre 60 % pour le dollar.
La Chine avance, méthode discrète, mais impact profond. Elle ne cherche pas à dominer, mais à proposer une alternative. Et cette alternative séduit Moscou, Téhéran, ou les partenaires de l’Initiative Belt and Road. Le pari ? Une finance parallèle, moins vulnérable aux sanctions, plus adaptée aux alliances du XXIᵉ siècle.
Aux États-Unis, Donald Trump a tué dans l’œuf tout projet de dollar numérique. Pour lui, une CBDC menace la liberté individuelle. « Nous allons interdire toute forme de monnaie numérique de banque centrale » a-t-il déclaré dès son retour au pouvoir. Résultat : la finance numérique américaine stagne pendant que la Chine construit.
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