L’Europe menace Washington d’une guerre économique inédite
Bruxelles retient son souffle. À l’approche du 1ᵉʳ août, le différend commercial avec Washington glisse vers l’affrontement stratégique. Face à la menace d’une surtaxe de 30 % sur les importations européennes, Paris et Berlin exigent une riposte ferme. Leur objectif : pousser l’UE à activer, pour la première fois, l’instrument anti-coercition.
En bref
- La France et l’Allemagne intensifient la pression sur la Commission européenne pour organiser une riposte contre les menaces tarifaires des États-Unis.
- Deux vagues de sanctions douanières européennes sont prêtes : 21 milliards d’euros de biens ciblés dès le 6 août, puis 72 milliards d’euros supplémentaires dès le 7 août.
- Une troisième offensive, encore en préparation, viserait directement les géants du numérique américains via des taxes sur les services digitaux et la publicité en ligne.
- Bruxelles envisage aussi d’activer l’Anti-Coercion Instrument (ACI), un outil inédit permettant de restreindre l’accès des entreprises américaines aux marchés publics de l’UE.
L’UE sort l’artillerie douanière
Dans une démonstration d’unité rare, la France et l’Allemagne ont officiellement appelé la Commission européenne à activer des mesures tarifaires ciblées contre les États-Unis si l’administration Trump ne renonce pas à sa menace de relèvement des droits de douane avant le 1er août.
Une série de représailles progressives est déjà prête. Selon les révélations du Financial Times, un premier paquet d’une valeur de 21 milliards d’euros pourrait être déployé dès le 6 août, visant des produits américains emblématiques. Une seconde vague, encore plus lourde, 72 milliards d’euros supplémentaires de marchandises, serait soumise au vote le même jour pour une entrée en vigueur possible le 7 août.
La décision est déjà cartographiée, mais l’espoir demeure que les États-Unis feront marche arrière avant l’échéance.
Les produits américains visés par ces représailles de l’Europe ne sont pas choisis au hasard. L’Union européenne cible délibérément des secteurs à forte visibilité ou à forte valeur politique sur le marché intérieur américain :
- La première salve (21 milliards €) : des produits de grande consommation tels que le poulet et les jeans, avec un impact symbolique élevé sur le quotidien des ménages US ;
- Une deuxième salve (72 milliards €) : des produits stratégiques, notamment les avions Boeing ou le bourbon, des industries fortement implantées dans des États clés de Trump ;
- La troisième salve en cours de préparation : elle viserait les services numériques américains, avec des taxes potentielles sur les publicités en ligne et certains modèles économiques des GAFAM.
Ce durcissement rapide est une réponse directe à une lettre envoyée par Donald Trump, dans laquelle le président américain avertit l’UE de son intention de porter les tarifs à 30 %. Ce message a, selon plusieurs sources diplomatiques, provoqué un changement de ton radical à Berlin.
L’Allemagne a fait un virage à 180 degrés en quelques jours, car même les plus modérés au sein de l’Europe souhaitent désormais montrer qu’ils ne plieront pas sans levier.
Une arme inédite dans l’arsenal européen : l’Anti-Coercion Instrument
En parallèle des mesures douanières classiques, Berlin et Paris soutiennent désormais un outil encore jamais activé, mais potentiellement explosif : l’Anti-Coercion Instrument (ACI). Ce dispositif légal, conçu pour contrer les pressions économiques exercées par des puissances étrangères, permettrait à la Commission européenne de bannir les entreprises américaines des marchés publics européens, annuler leurs protections de propriété intellectuelle, ou encore suspendre leurs opérations dans certains secteurs.
L’activation de cet instrument requerrait une enquête formelle sur les pratiques américaines, suivie d’une validation par les États membres si une coercition économique est confirmée.
Toutefois, l’ACI divise au sein même de l’Union. Si la France et l’Allemagne y voient un levier de dissuasion crédible face à la montée des tensions, plusieurs diplomates européens mettent en garde. Pour certains, « il existe une majorité silencieuse contre le déclenchement de l’ACI », tandis que d’autres pensent que : « ce serait nucléaire. La situation est trop instable pour évaluer avec certitude l’opinion des États membres ». Cette hésitation témoigne de la prudence de certains pays d’Europe, qui redoutent un engrenage commercial difficile à maîtriser.
Alors que les tensions s’aggravent et que les menaces de représailles commerciales se multiplient, certains investisseurs commencent à chercher des actifs susceptibles d’échapper aux turbulences politiques traditionnelles. Dans ce climat d’incertitude, le bitcoin regagne en crédibilité auprès des acteurs institutionnels comme valeur refuge numérique.
Si une escalade douanière venait à impacter l’euro ou le dollar, les marchés pourraient se tourner vers les actifs décentralisés, perçus comme indépendants des politiques monétaires et fiscales des États. En cas de recul de la confiance dans les monnaies fiat, ou de sanctions croisées sur les secteurs technologiques, la crypto reine pourrait bénéficier d’un regain d’attractivité, à la fois comme couverture contre l’instabilité et comme alternative systémique.
L’adoption de l’ACI aurait des implications majeures, bien au-delà des relations UE-USA. Elle signalerait une Europe prête à s’ériger en puissance souveraine dans la confrontation économique globale. Pour le secteur technologique, y compris les géants du numérique américains, l’impact pourrait être immédiat, notamment avec les projets de taxation des services digitaux ou de fiscalité sur la publicité en ligne évoqués dans une troisième liste préparée par Bruxelles, comme en témoigne sa riposte en mars dernier à l’annonce des taxes américaines sur les métaux.
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Diplômé de Sciences Po Toulouse et titulaire d'une certification consultant blockchain délivrée par Alyra, j'ai rejoint l'aventure Cointribune en 2019. Convaincu du potentiel de la blockchain pour transformer de nombreux secteurs de l'économie, j'ai pris l'engagement de sensibiliser et d'informer le grand public sur cet écosystème en constante évolution. Mon objectif est de permettre à chacun de mieux comprendre la blockchain et de saisir les opportunités qu'elle offre. Je m'efforce chaque jour de fournir une analyse objective de l'actualité, de décrypter les tendances du marché, de relayer les dernières innovations technologiques et de mettre en perspective les enjeux économiques et sociétaux de cette révolution en marche.
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