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L'hégémonie du dollar touche à sa fin

7h00 ▪ 6 min de lecture ▪ par Luc Jose A.
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Un basculement discret, mais massif redéfinit les équilibres monétaires mondiaux. En effet, plus de 90 pays, portés par les BRICS, abandonnent le dollar dans leurs échanges internationaux. À sa place, le yuan, le rouble ou la roupie s’imposent progressivement. Ce réalignement stratégique, loin d’un simple ajustement technique, remet en cause l’ordre financier bâti autour des États-Unis depuis l’après-guerre. Une volonté assumée de souveraineté économique et une contestation directe de l’hégémonie américaine sur les flux mondiaux sont à l’origine de ce mouvement.

La chute du Dollar en pleine réunion BRICS.

En bref

  • Plus de 90 pays ont amorcé une rupture historique avec le dollar américain dans leurs échanges internationaux.
  • Des régions entières, comme la Communauté des États Indépendants, l’Afrique et l’ASEAN, rejoignent le mouvement en adoptant leurs propres devises dans le commerce international.
  • Les États-Unis réagissent fermement, notamment via des menaces de sanctions commerciales brandies par Donald Trump.
  • Malgré les tensions, la dédollarisation apparaît comme une tendance durable, annonçant peut-être un nouvel équilibre monétaire mondial.

Les BRICS prennent la tête de la dédollarisation mondiale

Dès le début de l’année 2025, les membres des BRICS ont intensifié leur stratégie de dédollarisation par des actions concrètes comme la transition vers les monnaies locales. Cette dynamique repose sur une volonté commune de restaurer une forme de souveraineté monétaire dans les échanges internationaux.

Mohammad Reza Farzin, gouverneur de la Banque centrale iranienne, a affirmé :

Nous avons conclu un accord monétaire avec la Russie et avons complètement supprimé le dollar américain. Nous commerçons désormais exclusivement en rouble et en rial.

De même, entre l’Inde et la Russie, les échanges commerciaux sont passés de 13 à 27 milliards de dollars grâce à l’adoption de paiements en roupie. Quant au Brésil, il a mis en place des échanges directs entre le real et le yuan avec la Chine, soutenus par l’intégration du système de paiement chinois dans les institutions bancaires brésiliennes.

Au-delà des accords bilatéraux, les BRICS mettent en place des infrastructures financières dédiées, capables de rivaliser avec les systèmes occidentaux. Plusieurs mécanismes opérationnels traduisent cette stratégie :

  • Le BRICS Pay, un système de paiement transfrontalier en monnaies locales, permet déjà à plus de 50 pays partenaires de contourner SWIFT ;
  • La Communauté des États Indépendants (CIS), associée aux BRICS, réalise désormais 85 % de ses transactions transfrontalières en monnaies nationales ;
  • La New Development Bank (NDB) finance des projets d’infrastructure en devises locales, comme au Brésil (1 041 millions BRL) ou en Russie (68,8 millions USD) ;
  • Le rouble est passé de 10 % à plus de 40 % des exportations russes, un bond effectué depuis les sanctions liées au conflit en Ukraine.

Ces éléments montrent que la dédollarisation n’est plus une simple rhétorique politique. Elle est en train de s’insérer dans les rouages mêmes des échanges économiques internationaux, portée par des outils concrets, des décisions politiques assumées et une coordination régionale croissante.

Une dynamique qui dépasse largement le cercle des BRICS

Au-delà du cercle initial des BRICS, le mouvement de dédollarisation s’étend à de nombreux pays d’Afrique, d’Asie et de l’ex-URSS. La Communauté des États Indépendants (CIS), qui regroupe entre autres l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, le Kazakhstan et l’Ouzbékistan, effectue aujourd’hui plus de 85 % de ses transactions transfrontalières en monnaies locales.

L’Afrique n’est pas en reste. Ainsi, la Tanzanie a officiellement interdit le dollar dans certaines transactions, ouvrant la voie à des pays comme le Kenya et le Nigeria pour adopter à leur tour des modèles de paiement en monnaies souveraines. L’ASEAN, de son côté, promeut activement des mécanismes régionaux de règlements en devises locales.

L’un des secteurs où cette mutation est la plus manifeste est celui de l’énergie. L’Arabie Saoudite, désormais alignée sur les BRICS, accepte le yuan pour ses ventes de pétrole, tandis que l’Inde paie ses importations russes en roupies, sans passer par le dollar.

Le Ghana a quant à lui choisi d’utiliser l’or pour ses importations de brut. Ces mouvements sont souvent interprétés comme une réponse à l’utilisation politique du dollar. Vladimir Poutine l’a résumé ainsi : « Le dollar est utilisé comme une arme. Nous voyons vraiment que c’est le cas. C’est une grave erreur ».

Face à cette dynamique, la réaction des États-Unis a été immédiate. Donald Trump a menacé d’imposer des droits de douane de 100 % aux nations impliquées dans la mise en place d’alternatives monétaires. Ces menaces ont déjà eu des effets politiques.

Au Brésil, le président Lula a retiré de l’agenda de la présidence brésilienne des BRICS cette année l’idée d’une monnaie commune. « Le recours à l’unilatéralisme sape l’ordre international. Face à la polarisation, la défense cohérente du multilatéralisme est la seule voie à suivre », a-t-il néanmoins déclaré, marquant une position équilibrée.

Toutefois, la dynamique semble bien engagée. La dédollarisation n’est plus une simple contestation, c’est désormais un pivot stratégique mondial comme en témoignent de nombreuses initiatives visant la réduction de la dépendance au dollar. Reste à savoir si cette transformation monétaire entraînera un rééquilibrage durable du pouvoir économique ou si elle ne fera que renforcer la fragmentation géopolitique déjà à l’œuvre.

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Luc Jose A. avatar
Luc Jose A.

Diplômé de Sciences Po Toulouse et titulaire d'une certification consultant blockchain délivrée par Alyra, j'ai rejoint l'aventure Cointribune en 2019. Convaincu du potentiel de la blockchain pour transformer de nombreux secteurs de l'économie, j'ai pris l'engagement de sensibiliser et d'informer le grand public sur cet écosystème en constante évolution. Mon objectif est de permettre à chacun de mieux comprendre la blockchain et de saisir les opportunités qu'elle offre. Je m'efforce chaque jour de fournir une analyse objective de l'actualité, de décrypter les tendances du marché, de relayer les dernières innovations technologiques et de mettre en perspective les enjeux économiques et sociétaux de cette révolution en marche.

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